Responsabilité sociétale et développement durable

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Reflet de la pratique

À l’occasion, Vigie-PME analyse des entreprises qui ont négocié le virage du développement durable.

CAS : Services Conseils Design Industriel (SCDI)

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Auteurs: Kadia-Georges, Aka, François, Labelle
 

Identifiée comme l’un des 5 fleurons du développement durable au Québec, l’entreprise montréalaise SCDI est une PME de service-conseil en design industriel et d’exposition, c’est-à-dire qu’elle dessine des objets que ses clients font eux-mêmes fabriquer. Elle existe depuis 8 ans et n’a pas attendu pour être à l’avant-garde dans le domaine du DD. Elle a choisi de s’y engager fermement parce qu’elle est convaincue qu’en tant que PME elle est capable d’être rentable économiquement tout en l’étant écologiquement et socialement. Cette PME de 6 employés a mis en ligne sur Internet depuis 2002 un portail spécialement dédié au DD. Selon son président « chez SCDI, nous croyons au développement durable depuis longtemps. ».

 

1. L’engagement dans le DD de SCDI

1.1. Les convictions personnelles du président


L’engagement dans le DD de SCDI provient d’abord des convictions personnelles de son président. Pour lui, sa génération, celle des années 70, a vu :

« les premières images de cheminées qui polluaient, des désastres environnementaux qui commençaient à apparaître dans les sites d’enfouissement ou des déversements sauvages. ».

Cette génération est donc plus sensible aux questions environnementales et ressent le devoir d’agir. Pour le président de SCDI, en tant que designer, il doit optimiser l’usage des ressources en fonction des coûts, des matériaux et des usagers. De ce fait, il s’est promis de ne pas concevoir de produits qui sont nuisibles.


1.2. L’engagement environnemental


L’engagement environnemental de SCDI n’est plus à prouver. Elle est reconnue comme « la première firme-conseil au Canada certifiée  « Compagnie carbone zéro ». Elle reçoit ce prix car elle a mis en place deux programmes qui visent à réduire son impact environnemental.

* Un programme de reboisement : il s’agit pour SCDI de planter un arbre par défaut chaque fois qu’un nouveau dossier ou mandat est ouvert.
* Un programme de neutralisation des GES : qui comporte deux volets. Le premier vise à neutraliser les émissions annuelles de l’entreprise et le deuxième permet la neutralisation, au nom de ses clients, de la production de GES des projets réalisés. Par exemple,

« Si on prépare une exposition, on évalue dès le début du projet le transport du matériel, puis la fabrication des objets qui seront placés dans la salle. Ces deux activités impliquent des émissions de GES qui n’auraient pas été dégagées si on n’avait pas demandé de transporter du matériel, si on n’avait pas fait transformer des panneaux et des métaux. Donc on évalue ces émissions et on les neutralise en plantant une quantité d’arbres en fonction du nombre de tonnes de CO2. On le fait pour chacun de nos projets. Cela veut dire qu’on plante beaucoup d’arbres […]. »

* Pour neutraliser le reste de ses émissions, SCDI a pris contact avec Future Forests, une société qui vend des crédits de carbone. Cependant « nous nous sommes fait dire que nous étions trop petits », déplorent les dirigeants. Malgré cela, SCDI a acheté un terrain de 11 hectares où sont plantés en moyenne 500 arbres par année pour compenser leurs émissions et celles des projets réalisés. De plus, la PME recycle le papier, le réutilise en faisant des blocs-notes, et achète des fournitures qui sont peu emballées.

Enfin, SCDI a adopté un plan de mise en place de sources d'énergies écologiques pour satisfaire ses besoins énergétiques à partir de l'éolien et du solaire. Au terme de ce plan, l’entreprise atteindra son autosuffisance énergétique et les surplus d'énergies éolienne et solaire seront revendus à Hydro-Québec. Ce plan est développé avec l'expertise de l'entreprise montréalaise spécialisée Écosolaire international inc.


1.3. L’engagement social


SCDI est aussi engagé au niveau social à travers le soutien financier apporté à Éthiquette, un organisme qui promeut la consommation responsable, et par la mise en ligne d’un site Internet dédié à la promotion de gestes responsables. Son souci pour le développement socio-économique local est aussi remarquable. Par exemple, le Conseil municipal d’une ville au nord de Montréal a donné à SCDI le mandat de concevoir des plaques commémoratives soulignant ses 150 ans. L’entreprise a mis de côté ses grands fournisseurs montréalais et a confié la fabrication des pièces au vitrier, à l'ébéniste et à l'imprimeur de cette ville. Le président SCDI explique que

«  Quand quelqu’un de St-Eustache, de Trois-Rivières m’appelle, moi je sais qu’il a une certaine somme d’argent à dépenser dans son projet. Cette somme d’argent est déjà dans la région. Elle doit normalement servir à développer l’économie de cette région-là. Si je fais un dessin qui est ensuite fabriqué à Montréal, car c’est ici que sont les grands fournisseurs, ses sous viennent dans ma région et ça n’aide pas du tout sa communauté, ça n’aide pas les gens qui contribuent à sa fondation et qui sont membres de ses réseaux. Nous, on leur dit qu’on va dessiner les choses de façon à ce que ça utilise le moins de matériaux possible et que ce soit facile à mettre en forme pour permettre à des fournisseurs de la région de les réaliser […] ».

Ce fractionnement des contrats n’est qu’une illustration de son engagement social qui est de faire profiter aux acteurs locaux des bénéfices du développement économique local. De plus, la PME a pris l’engagement de diffuser ses actions et d’encourager les autres membres de la société à identifier leurs moyens d’action et à les mettre en œuvre. Pour cela, elle a mis sur pied un site Internet qui est voué à la promotion de comportements simples et sains que tout citoyen peut adopter dans la préservation des écosystèmes.


2. Les pratiques et outils de gestion du DD chez SCDI

2.1. La collaboration avec le GRI


SCDI est membre du Global Reporting Initiative (GRI) qui développe les normes internationales pour la production de rapport annuel sur le développement durable par les entreprises. Elle est la 7ème entreprise au Canada partenaire du Global Reporting Institute, et certainement l’une des plus petites et très rares TPE au monde à publier un rapport de DD. C’est grâce à cette institution qu’elle a pu avoir les connaissances et l’expertise nécessaires pour réaliser ses rapports de DD. Pour SCDI, c’est une preuve que la taille de l’entreprise n’est pas une contrainte suffisante pour négliger son rôle sociétal et environnemental.


2.2. Le soutien à Éthiquette et la collaboration avec Cataléthique


SCDI collabore aussi avec Cataléthique et Éthiquette, deux organismes québécois voués à la promotion du DD. La PME apporte son soutien à Éthiquette en annonçant ses produits et sa démarche sur leur site Internet. Avec Cataléthique, SCDI participe à un réseau de rencontres, d’échanges et de partage des bonnes pratiques en matière de DD où, elle « apprend des expériences des autres, de ce qu’ils font », affirme le président.


2.3. L’évaluation de l’empreinte écologique


SCDI évalue régulièrement l’empreinte écologique des projets qu’elle réalise. Grâce à un logiciel, elle évalue les projets en tonnes de CO2. Par exemple pour une œuvre artistique faite en aluminium, 1 kilo d’aluminium va générer 223 grammes de CO2. Cette quantité de CO2 générée à l’issue de ce projet sera compensée par une quantité correspondante d’arbres plantés pour neutraliser les GES émis.


2.3. La publication des rapports de DD


Sur son site Internet SCDI publie chaque année son rapport de DD. Dans ce rapport, l’entreprise fait un bilan économique, environnemental et social de ses actions et de ses activités. Le président affirme que:

« Il faudrait que les entreprises puissent faire leur rapport annuel non seulement avec les valeurs économiques, mais avec les deux autres valeurs aussi, comparer en quelque sorte les pommes et les oranges. On l’a fait et ça nous a appris pas mal de choses sur notre fonctionnement. Cela nous a permis de nous fixer des objectifs nous-mêmes. »

Ce rapport est aussi un véritable outil de gestion du DD car il comprend des indicateurs de performance :

* Économique : chiffre d’affaires net, coût de l’ensemble des biens, matières premières et services achetés, salaires et prestations versés, impôts payés par pays;

* Environnementale : consommation directe d’énergie repartie par source primaire, émissions de GES, quantité totale de déchets par type et par destination, impacts environnementaux significatifs des principaux produits et services, initiatives pour exploiter des sources d’énergie renouvelable et améliorer le rendement énergétique, autre consommation d’énergie indirecte et implications, telles que voyages d’affaires, gestion du cycle de vie des produits et utilisation de matériaux à forte intensité énergétique, exemple de fournisseurs avec politique environnementale;

* Sociale : composition de la direction générale, description de la politique destinée à préserver la santé et la sécurité des consommateurs, publicité et description de la politique, des procédures/systèmes de management et des mécanismes de contrôle, preuve de la prise en compte des impacts en matière de droits de l’homme dans les décisions d’investissement et d’achat, y compris la sélection des fournisseurs/sous-traitants.

3. L’innovation chez SCDI:

3.1. Le design éco-logique


Le design éco-logique est une invention de SCDI. C’est une approche de design qui incarne les valeurs de sobriété, de respect de l’être humain, de respect de son milieu de vie et de respect de la matière. Elle permet à SCDI de concevoir et de vendre des produits et services innovants au « design adapté [qui se veut] éco-logique dans le respect de l’homme, de la matière et de la société […] dans une recherche d’éco-efficacité. » Selon les dirigeants, cette démarche innovante :

« est faite en sorte que dès la conception, on utilise des procédés qui sont réversibles et des matériaux plus naturels; on évite les plastiques par choix à moins de ne pouvoir faire autrement, car il y a des propriétés qu’on ne peut pas parfois trouver. On va prendre des matériaux locaux, donc peu de produits importés. C’est pour cela qu’on utilise beaucoup l’aluminium parce que c’est produit ici dans la province; ce qui fait qu’il y a moins de transport associé. Cette démarche nécessite de faire des mises en forme simples et réversibles, des produits de finition écologiques dans la mesure du possible. Dans notre

conception on va par exemple éviter les formes complexes qui vont demander des mises en forme particulières qui ne peuvent pas être réalisées ou réparées en région, parce que nos projets sont souvent à l’extérieur de Montréal. On va aussi diminuer le volume, car nous concevons beaucoup de mobiliers d’ambiance et d’aménagement. Alors on va essayer de travailler autrement : on va prendre moins de matériaux pour pouvoir avoir le même résultat. C’est dans ce sens là qu’on a une démarche particulière et ça c’est notre innovation. ».


3.2. L’attestation de DD


SCDI délivre des attestations de développement durable à ses clients pour lesquels elle a réalisé des projets. Dans ces attestations, l’entreprise indique la quantité de GES qui a été neutralisée dans la réalisation du projet du client. Pour SCDI « c’est de l’innovation aussi, parce qu’ [elle est la] seule à présenter cette méthode».

En conclusion, dans sa phase de démarrage en 2002, SCDI avait décidé que 80% de son chiffre d'affaires devrait être constitué de contrats et de mandats associés au DD ou liés à la protection de l'environnement en 2010. Selon son 3ème rapport de DD, les services associés au DD représentaient 54% de son chiffre d’affaires en 2003-2004, 26% en 2004-2005, et 48% en 2005-2006. En définitive, même s’il lui est difficile aujourd’hui d’évaluer les retombées de son engagement dans le DD sur la rentabilité et la croissance de son entreprise, le président de SCDI reconnaît que cela lui a permis de :

* Se différencier de ses concurrents;
* Améliorer sa réputation auprès de clients qui n’hésitent pas à s’associer à sa façon de travailler ou d’autres organisations comme la Jeune chambre de commerce de Montréal qui s’inspire de son rapport de DD;
* Attirer de nouveaux clients pour son implication écologique;
* Innover dans ses façons de faire ou dans la conception de ses designs (design éco-logique, attestation de DD);
* Développer des produits écologiques innovants;
* Utiliser des outils de créativité et de gestion du DD (bulletin électronique, capsule du temps, rapport de DD);
* Collaborer et apprendre des autres (Carbon Zero Project, GRI, Cataléthique, Étiquette, Écosolaire International).


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Last Updated on Thursday, 13 October 2011 12:19

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