Responsabilité sociétale et développement durable

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S’évadez de la prison verte par la coopération

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Vous souhaitez adopter des pratiques de développement durable, mais leur mise en place semble coûteuse ? Vous doutez pouvoir en retirer les bénéfices escomptés ? Peut-être êtes-vous prisonnier d’une «prison verte». Comment s’en évader ? L’issue se trouve d’abord dans la collaboration et la coopération.
par Clément Lamy, Antoine Champoux et Anne-Marie Pichette, avec la collaboration de François Labelle


Réduire ma compétitivité ? Jamais !
Zoom sur la fameuse barrière de corail située au nord-est de l’Australie, au large du Queensland. Chaque année, deux millions de touristes la visitent, fascinés par son extraordinaire biodiversité. Ce qui n’est pas sans conséquence : l'intensité des activités touristiques menace le fragile équilibre de l’endroit.

Pour protéger cette « merveille du patrimoine naturel mondial », mais aussi pour éviter de perdre leur gagne-pain, les opérateurs touristiques ont adopté des normes informelles conçues pour contrer les comportements préjudiciables.

Le problème ? Sans mécanismes de contrôle, ces normes informelles n’ont été respectées que par un petit nombre d’opérateurs touristiques. Plusieurs touristes, mal informés des conséquences, continuaient de préférer les opérateurs qui les emmenaient au plus près des récifs à ceux qui gardaient une distance respectueuse. Dans ce contexte, contourner ou ignorer les règles offrait un substantiel avantage concurrentiel.

Les opérateurs touristiques convaincus du bien-fondé des règles sont ainsi devenus captifs d’une « prison verte ».

Qu’est que la «prison verte»? Il s’agit d’un concept : une construction virtuelle à l'intérieur de laquelle les pratiques favorables à un développement durable entraînent des coûts ou des inconvénients… alors qu'une vue à court terme procure des avantages aux « délinquants ».

Le phénomène de la prison verte expliqué
En raison de certaines conditions du marché, des pratiques de développement durable peuvent donc se trouver « punies » plutôt que récompensées.

Ce genre de problème se manifeste régulièrement. Combien d’initiatives pro environnement se voient boudées ou court-circuitées par des entrepreneurs qui les opposent aux bénéfices à court terme qu'ils souhaitent obtenir ?

Pour mieux comprendre le phénomène, Désirée Pacheco (Portland State University), Thomas Dean (Colorado State University) et David Payne (University of Colorado-Boulder), réinterprètent le dilemme du prisonnier, un classique de la théorie des jeux.

Collaborer ou ne penser qu’à sa propre peau ? Lorsqu’un entrepreneur adopte une stratégie de coopération, il considère qu’il a avantage à privilégier les gains collectifs et, à long terme, le développement durable.

À l’inverse, avec une stratégie individualiste, ce sont les gains personnels et à court terme, qui sont favorisés. Et ce sans égards aux coûts collectifs entraînés par les mauvaises pratiques.

Ce type de situation entraîne une disparité de compétitivité entre ceux qui s’emploient à un développement durable et ceux qui choisissent leurs outils de croissance sans égard aux conséquences environnementales ou sociales.

Cependant, si toutes les entreprises agissent de manière individualiste, les gains s’en trouvent limités pour chacun. La pratique le prouve. Concrètement, c’est l’adhésion volontaire à un projet collectif qui entraîne un maximum de gains à partager.

La grande évasion
Revenons à notre localité australienne. Motivés par leurs convictions environnementales ainsi que par le désir de sauvegarder leur source de richesse et d’emploi, plusieurs entrepreneurs formalisent les règles et les soutiennent par des mécanismes de contrôle.

Sévères, ces normes dépassent les exigences des lois en vigueur. À ceci, s’ajoute une campagne de promotion locale.

Et ça fonctionne ! Ces normes, portées à la connaissance de l'ensemble des parties prenantes, obtiennent localement un appui solide. La pression sociale s’exerce sur les entreprises délinquantes. Les comportements sauvages, autrefois récompensés par des gains, se voient désormais pénalisés par des pertes de réputation et de clientèle.

Trois clés pour sortir d'une prison verte
Pour échapper à la «prison verte», il semble donc que l’entrepreneur doit contribuer de façon proactive, et collaborative, à l'élaboration ou à la modification des règles du jeu.

Les chercheurs identifient trois types de moyens pour le faire : adopter des normes, contrôler les droits de propriété et influencer la législation gouvernementale.

S'évader grâce aux labels et aux normes
Les normes constituent un puissant moyen de transformation d’une industrie en encourageant des comportements uniformes.

Au-delà de la création de normes favorables au développement durable, le réel défi se situe dans le contrôle de leur application. Sans sanctions, les normes demeurent des comportements enviables, et non un impératif d’affaires. L’exemple des opérateurs touristiques de la grande barrière de corail le met en lumière.

S'échapper en instaurant des droits de propriété
L’absence de droits de propriété peut aussi favoriser l’abus des ressources collectives. Les cas de surpêche l’illustrent bien.

Pour parer à la diminution des stocks de homards du Maine, aux Etats-Unis, les pêcheurs locaux ont ainsi eu recours à un droit de propriété créé de toute pièce. Imaginatifs, ils se sont regroupés pour émettre un nombre contrôlé de permis d’accès aux emplacements de pêche. Voilà qui diminue les pratiques déloyales et permet aux pêcheurs de s'affranchir de leur «prison verte » !

La liberté grâce... à la législation gouvernementale !
Ne nous leurrons pas : sans législation gouvernementale, certaines entreprises maintiendront leurs comportements individualistes au détriment du bien commun.
Le lobbying et les stratégies de communication à grande échelle peuvent contribuer à légiférer en faveur de pratiques de développement durable. En raison des coûts reliés à cette stratégie, cette avenue s’adresse plus particulièrement aux regroupements d’entreprises.

Contourner les obstacles
S’évader de la «prison verte» n’est certes pas une entreprise facile. Les efforts de concertation requis sont importants.

Les entrepreneurs qui sont en mesure de surpasser les difficultés, de se concerter, de collaborer, peuvent prétendre à l’établissement de pratiques d’affaires durables. L’union fait la force ! Au sortir des prisons vertes se trouve un foisonnement d'opportunités d’affaires durables.

Pratiques clés @vigiepme #ddpme
Actions collectives pour sortir de l’impasse du seul bénéfice à court terme : des normes innovantes, la propriété commune et la législation.

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Pour en savoir plus...

Pacheco, Desirée F., Dean, Thomas J., et Payne, David S. (2010) Escaping the green prison: Entrepreneurship and the creation of opportunities for sustainable development. Journal of Business Venturing 25 (2010) 464480.

La protection de la grande barrière de corail : australia.gov.au/about-australia/australian-story/great-barrier-reef
Synapse
Pour d’autres pratiques ancrées dans l’action, consultez le site de Synapse, notre partenaire de l’Université du Québec à Chicoutimi

Le site d’échange, de participation et de collaboration sur des thèmes de développement durable : http://synapse.uqac.ca

À propos des auteurs
Licence Creative Commons
Clément Lamy et Antoine Champoux sont étudiants au programme de MBA de l’Université du Québec à Trois-Rivières (UQTR). Anne-Marie Pichette, MBA, est coordonnatrice du projet de vulgarisation de Vigie-PME. This e-mail address is being protected from spambots. You need JavaScript enabled to view it

Une initiative du Laboratoire de recherche sur le développement durable en contexte de PME – Institut de recherche sur les PME de l’UQTR
Direction : François Labelle ( This e-mail address is being protected from spambots. You need JavaScript enabled to view it ) – Rédaction en chef et coaching : Anne-Marie Pichette ( This e-mail address is being protected from spambots. You need JavaScript enabled to view it )

Last Updated on Friday, 02 March 2018 15:56

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